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Julien Espinosa : « Ne pas rentrer dans une logique de l’exploit »

Julien Espinosa : « Ne pas rentrer dans une logique de l’exploit »

Interview réalisée par Florent De Lamberterie pour LNB.fr / Retrouvez l’interview complète sur LNB.fr

Crédit Photo: Romain Robini / Sharks

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Coach d’une équipe d’Antibes qui réalise un bon début de saison, Julien Espinosa compte installer les Sharks dans la durée.

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Avec la victoire de ce week-end contre Châlons-Reims, Antibes pointe en première moitié de classement avec 3 succès en 5 matches. Les Sharks ne seraient-ils pas la bonne surprise de ce début de saison ?

C’est encore trop tôt pour s’intéresser au classement mais c’est certain que commencer avec 3 victoires en 5 matches, c’est clairement le début qu’on espérait, sachant que là-dedans on a eu deux déplacements chez des très gros du championnat (Strasbourg et ASVEL) dont on sait qu’ils finiront aux premières places. La vraie satisfaction c’est d’avoir réussi à gagner tous nos matches à domicile. On aimerait bien maintenant faire quelques coups à l’extérieur, ce qui sera la clé pour s’assurer le maintien le plus confortable possible. Mon objectif est de maintenir le club en Pro A, et de la façon la plus large possible. Si on se maintenait avec une victoire de plus que le premier relégable, l’objectif serait déjà atteint mais si on pouvait le faire avec quelques victoires d’avance, ça voudrait dire que c’est un très, très bon championnat pour nous.

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C’est la deuxième montée d’Antibes en peu de temps, après celle de 2013, qui s’était malheureusement suivie par une descente dans la foulée. Que reste-t-il aujourd’hui de cette expérience ?

Plus rien. On a tiré les enseignements de cette saison il y a longtemps, on a appris et fait en sorte l’an dernier, quand on est redescendu en Pro B, de reconstruire l’équipe avec un potentiel, pour pouvoir regarder à moyen terme vers la Pro A. On avait donc pris des joueurs qui pouvaient nous accompagner d’une saison sur l’autre. Alors c’est vrai qu’on misait d’avantage sur une remontée en plusieurs années donc on avait essayé de lancer des jeunes joueurs pour les faire éclore et jouer la montée avec eux à terme. Mais les choses ont été beaucoup plus vite que prévues. Nos jeunes, Cabarrot, Mbida, Bourdillon, ont éclot bien plus vite que ce qu’on pensait et ont apporté un nouveau de performance en deuxième partie de saison qui nous a permis de monter. Donc les ambitions sur le court terme ont un peu changé, et les aspirations de ces joueurs aussi. Junior Mbida est parti à Monaco et Timothé Cabarrot a choisi de partir à l’étranger. Mais on ne peut s’en prendre qu’à nous-mêmes, on n’avait qu’à anticiper le fait qu’ils soient aussi performants pour les garder au club. Mais on était pas sur un projet de montée l’an dernier en début de saison.

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L’équipe de cette année est un alliage entre joueurs très expérimentés (Diarra, Blue, Solomon, King….) et assez jeunes joueurs (Dallo, Fall…) Etait-ce une volonté de votre part ou une conséquence de vos moyens limités, à savoir la plus petite masse salariale de Pro A ?

C’est un peu des deux. Je suis assez adepte de ce melting pot entre joueurs expérimentés et joueurs à potentiel à développer. Ce genre d’amalgame fonctionne bien dans le travail que je propose. C’est aussi encouragé par nos moyens financiers mais même avec d’autres moyens, c’est un système qui me paraît adapté à la façon dont je travaille. C’est donc choisi avant tout.

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Crédit Photo: Romain Robini / Sharks

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Parlons des recrues. Il y a le cas de Bernard King, un sacré client de Pro A il n’y a encore pas si longtemps mais qui semble avoir plus de mal cette année (3,0 pts à 22,7%). A 34 ans, n’est-il pas cramé ?

Entre sa dernière saison au Havre et cette année, il a eu une opération du genou et deux saisons écoulées. Et on ne revient pas aussi facilement d’une opération telle à 34 ans qu’à 26 ou 27. Il doit s’adapter à un système en place et monter son niveau individuel pour retrouver le niveau d’efficacité qu’on lui connaît. La grosse différence, c’est qu’on n’attend pas de lui qu’il révolutionne notre système de jeu, mais qu’il y trouve son efficacité à l’intérieur et qu’il nous apporte sa qualité de basketteur qui est incontestable. Il a une vision du jeu et une qualité de passe qui sont au-dessus de la moyenne, largement. Maintenant, ce qui est certain c’est qu’il faut qu’il arrive  hausser son niveau de jeu pour pouvoir exprimer ça. Mais ça va de mieux en mieux, au dernier match il fait sept passes décisives.

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Il y a aussi le cas Moustapha Fall (2,18 m, 23 ans), un jeune joueur très grand qui vient de faire un excellent match contre Châlons-Reims (18 pts, 7 rbds). Un beau potentiel. Jusqu’où peut-il aller d’après vous ?

Les joueurs de grande taille comme lui ont des qualités évidentes sur tout ce qui est près du cercle, aérien. C’est un immense gabarit donc un vrai intimidateur défensif et qui s’il reçoit la balle près du panier va tout de suite avoir de l’efficacité. En revanche, sur le jeu au sol, il a besoin de progresser. C’est à la fois u travail technique et physique, sur ses appuis, sa densité physique… Mais c’est un garçon qui est une véritable éponge, il apprend à vitesse grand V et est extrêmement attentif aux consignes, aux retours des membres du staff. Je l’imagine faire encore beaucoup de progrès sur la saison actuelle.

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C’est votre deuxième montée avec Antibes mais lors de la première montée en 2013, le club avait choisi un autre entraîneur, Jean-Aimé Toupane, après les playoffs. A l’époque, aviez-vous été déçu de ce choix ? Ce manque de confiance ?

Tout ce que j’avais  dire sur il y a deux ans, je l’ai dit il y a deux ans, donc aujourd’hui je n’en parle plus. On est reparti sur un nouveau projet, avec un autre mode de fonctionnement, une autre méthode de direction à la tête du club, d’autres choix, plus basés sur le développement sportif à moyen terme, sur la patience, le travail de fond. Ce n’est plus le même projet qu’il y a deux ans, et aujourd’hui je regarde l’avenir.

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L’avenir justement, quel pourrait être le vôtre ? Vous êtes encore un jeune coach (31 ans) et pourtant vous officiez déjà en Pro A. Quels sont les objectifs qui vous animent ? Un départ à l’étranger par exemple, chose rare chez les entraîneurs français ?

Au-delà du projet antibois qui est le projet central, avec mes dirigeants, je leur demande chaque année de m’aider à voir ailleurs en été comment ça se passe, comment ça travaille… J’envie toujours les entraîneurs qui ont la chance de voir comment on travaille à l’étranger…Ce n’est pas tous les jours faciles de voir un autre mode de fonctionnement, ne serait-ce que dans des stages, mais oui, j’ai une curiosité très portée sur ce qui se passe ailleurs. Ce n’est pas facile d’échanger avec l’étranger, il faut des gens qui vous ouvrent les portes. Mais je vais vous dire, même en France, ce n’est pas toujours facile d’aller voir ce qui se fait chez le voisin. On n’a pas forcément cette culture de l’échange chez les entraîneurs français. Moi, je suis très demandeur de ça, j’ai déjà proposé à plusieurs coaches de venir voir comment je travaille à Antibes mais pour le moment, personne n’est venu.

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Crédit Photo: Romain Robini / Sharks

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Il n’y a pas vraiment de solidarité entre les coaches ?

Il y a un vrai bon fond, une vraie empathie entre les coaches. Je suis le premier à avoir appelé Fred Brouillaud quand j’ai vu la nouvelle (il a été remercié à Roanne cette semaine), je lui ai apporté tout mon soutien moral et cela existe parmi les coaches. Mais pas forcément les opportunités de faire des vrais échanges techniques. C’est quelque chose qui me manque un peu et que j’aimerais mettre en place à l’avenir.

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Etant donnés vos bons résultats, craignez-vous d’être davantage attendus ?

Je pense que dès le début de saison, personne ne nous a pris de haut. Je n’ai pas vu d’équipes mettre des gamins sur le terrain contre nous. Ce n’est pas parce qu’on n’a pas beaucoup d’argent que les adversaires pensent qu’on est mauvais, personne ne fonctionne comme ça. On ne scoute pas sur la masse salariale mais sur ce qui est produit sur le terrain.

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Depuis la fin du grand Antibes des années 90, le basket français cherche une place forte dans le Sud-Est de la France. Or cette année, Antibes et Monaco sont montés. Pensez-vous que l’un de ces deux clubs, et en l’occurrence Antibes, puisse à terme devenir une place forte du basket français ?

On est vraiment sur deux modèles économiques totalement différents. Monaco est sur un modèle économique à effet immédiat, Antibes est sur un modèle qui demande davantage d’inertie. L’étape à laquelle nous sommes aujourd’hui, c’est une consolidation des bases sportives et financières. Il faut que le club puisse travailler sur les mêmes bases que la moyenne des clubs de Pro A. Ce sera déjà une réussite d’en arriver là sur les deux prochaines saisons. Le reste, ça ne nous concerne pas pour l’instant. Aujourd’hui, on ne joue pas pour le titre en Pro A, la marche est encore trop haute et je ne veux pas rentrer dans une logique de l’exploit, mais dans une logique de stabilité. Stabilisons le club en Pro A, c’est mon objectif fort, pour donner le temps au club de retrouver les standards économiques de ce qui se fait en Pro A.

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Vous avez dans cette optique un atout, l’Azurarena, une salle moderne.

Aujourd’hui, la salle est notre plus bel atout. C’est une salle magnifique, l’une des plus belles de France, un outil de travail à la fois sportif et économique de top niveau et ça c’est la contribution du secteur public local. Mais derrière, pour augmenter notre marge économique, cela va se faire par le développement du secteur privé. Et le challenge est énorme parce que beaucoup de clubs en Pro A bénéficient de plus de subventions publiques que nous. Mais c’est un modèle qui à l’avenir va se développer partout en France parce que ce n’est plus le secteur public qui doit financer le basket professionnel. Parce quand c’est le secteur public qui paie des titres et que 20 ans après… A Antibes, la mairie a acheté des titres à crédit à l’époque. Et 20 ans après, on nous dit « quand est-ce qu’Antibes va rejouer les premiers rôles ? » Déjà, qu’on nous laisse le temps de rembourser la dette des années 90, parce que ce n’est pas fini. Et ce qu’on fait aujourd’hui, ça ne crée pas de dette. C’est une réalité ! Le monde a changé et tous les clubs à l’avenir vont être concernés. Le modèle qui consiste à réclamer de l’argent au secteur public ne sera plus viable à l’avenir.

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Pour votre prochaine rencontre, vous vous déplacez au Havre, une équipe par certains points similaires à la vôtre : petit budget, jeune coach… En revanche, Le Havre n’a toujours pas la moindre victoire tandis que vous en avez trois. Finalement, n’êtes-vous pas le favori de cette rencontre ?

Je ne sais pas. Aujourd’hui on est très loin de l’heure du bilan, tout le monde n’a pas rencontré tout le monde. Il suffit qu’ils aient eu un calendrier plus compliqué que le nôtre pour que ça prenne des proportions visuellement importantes. La réalité c’est que ça va être un match capital pour le maintien. C’est notre première finale cette année, il va falloir être capable de la jouer dans le bon état d’esprit, sans penser que Le Havre sera plus simple à battre qu’une autre équipe, d’autant qu’on n’a pas encore gagné un match à l’extérieur.

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Interview réalisée par Florent De Lamberterie pour LNB.fr / Retrouvez l’interview complète sur LNB.fr

Crédit Photo: Romain Robini / Sharks

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